Des violences sociales et de la guerre civile

Des violences sociales et de la guerre civile

            Les quelques semaines qui nous séparent désormais du second tour – sans la moindre surprise – de l’élection présidentielle ont été riches d’enseignements. La lassitude et l’exaspération que je ressens suite aux débats que j’ai eus avec de nombreux sophistes, ceux auxquels j’ai assisté, me poussent à passer cette étape. Je m’attèle directement à la suite probable des évènements. Évidemment, la plus élémentaire courtoisie républicaine m’amène à souhaiter au Président réélu de réussir pour la France. Le souhait est sincère mais l’échec est assuré : Macron n’est pas calibré pour cela : il ne connaît pas la France, n’est pas républicain, pratique le mépris de classe, n’apporte pas les réponses nécessaires aux différents enjeux et tombe coup sur coup dans les pièges posés sur notre chemin.
 
Le vote de classe auquel nous avons assisté et le score – trop – confortable du Président de la République ont positionné sa majorité en pole position. Le premier magistrat, hybride de différentes traditions politiques – souvent contradictoires du reste – aura donc les coudées franches sans alternatives crédibles.
Macron le Girondin d’abord ; il a annoncé sans mot dire qu’il ne répondrait pas aux exigences démocratiques et qu’il achèverait la République sociale. Le fer de lance de cette politique sera évidemment la question de la retraite. Les prolétaires, les travailleurs, ouvriers, artisans, agriculteurs, les membres des petites classes moyennes, en somme les premières victimes des politiques à venir, ces citoyens que l’on a fait passer pour des « ploucs fascistes », n’ont aucuns relais possibles. Effectivement, la « bourgeoisie progressiste et modérée » n’a pas appelé à faire barrage à Marine Le Pen, mais à voter pour Macron, certains ayant eu l’indécence d’expliquer que l’affaire McKinsey n’avait rien de scandaleux ou encore qu’il était évident que nous devrions travailler plus longtemps. Aussi, vous tous qui avez manqué de retenue, et alors-même que le résultat était connu d’avance – une élection se gagne au premier tour –, vous êtes définitivement discrédités. Vous avez cautionné et relayé le programme revendiqué de casse sociale et de pratiques autocratiques du pouvoir, et ce, malgré un quinquennat calamiteux – j’attends avec impatience la proposition de septennat renouvelable, Macron est jeune… Vous (vous) êtes de facto associés aux choix néo-libéraux et conservateurs à venir, et c’est tragique. L’impossible « relai bourgeois » ne peut avoir qu’une seule résultante : l’insurrection brutale et quasi-permanente. Nous allons vers des violences sociales terribles ! Posez votre smiley lol maintenant – j’en ai vu des débiles de post en post –, demain, vous pleurerez quand vous réaliserez que nous vivrons les gilets jaunes puissance 10…
 
 
Macron le jésuite ensuite ; cet ennemi de la laïcité qui a eu à cœur de récupérer le titre de Chanoine de Latran, se refusant à appliquer l’esprit de la loi et à frapper les pratiques islamiques rétrogrades, réactionnaires, intégristes, fanatiques, aura beau se cacher derrière un paravent, « la loi contre le séparatisme » – il n’est pas ici question de « simple » séparatisme, mais de fanatisme religieux – et des effets de communication – des associations dissoutes qui se reconstituent alors que leurs dirigeants auraient dû être poursuivis pénalement et que nombre de prédicateurs devraient être incarcérés et/ou expulsés –, il est foncièrement, intrinsèquement concordataire. N’en déplaise aux sophistes, quand bien-même ils ont des oripeaux universitaires, mais il n’y a pas de « laïcité concordataire », cela n’a aucun sens. Le Concordat est un mariage, la laïcité un divorce ; expérimentant actuellement le second, je puis vous confirmer que l’on ne peut être dans les deux « en même temps »…
 
A ceux de mes « lecteurs » qui me reprochent de parler régulièrement d’islam, je rétorquerais bien que je ne les ai pas vus se signaler lorsque j’ai chargé contre le catholicisme quand nombre d’immondes personnages ont voulu protéger le secret de la confession couvrant la pédo-criminalité, mais je préfère leur opposer que je me tamponne du délit de blasphème islamique voté par l’ONU. Je préfère leur dire, ce ne sont pas d’un côté les laïques qui veulent parler de l’islam, ni de l’autre les nostalgiques de la France fille aînée de l’Église – que l’islam a réveillés –, c’est l’islam lui-même qui ne fait que parler de lui, qui ne donne qu’à parler de lui. Je soutiens que les moments politiques sur les 15 à 20 années qui viennent se feront d’abord et avant tout sur le rapport à l’islam – l’élément qui suivra directement, et ce n’est pas complètement déconnecté, est la question de l’UE. L’islam est incompatible avec ce qu’il n’est pas, il doit être contraint ici comme le fut hier le catholicisme. Cela, Macron en est incapable et le modérantisme nouveau, le relativisme inhabituel des « laïques » qui l’ont rejoint, la limitation absurde – qui relève du contre-sens historique – de la laïcité à un « simple » élément juridique, alors qu’elle est fondamentalement un principe politique radical, donc un choix de société, en sont la preuve.
L’islam, qui paradoxalement vit son chant du cygne – ce qui peut expliquer ses expressions de plus en plus prosélytes et violentes – a réussi son pari du fait de la lâcheté et du collaborationnisme des classes politique et médiatique, du secteur associatif, de l’éducation populaire, de l’Éducation Nationale, des syndicats et de… nombre de citoyens : s’imposer comme un référent culturel, politique, juridique, civil. Dans un pays qui a sécularisé la société au forceps et qui a le souvenir douloureux des persécutions au nom de la foi, l’on observe heureusement des capacités de résistance sinon inédites, du moins sans communes mesures ailleurs. Nos frères, nos sœurs, les démocrates, les laïques, les apostats, au Maghreb et au Proche-Orient, ne cessent de nous avertir eux, depuis près d’un demi-siècle ! Je combats avec eux, pas simplement du fait de mes origines, mais parce que j’ai compris le message qu’ils nous envoient explicitement : « tenez-bon en France, sinon nous mourrons ici ! » 
 
Malheureusement, ce fondamentalisme islamique, danger imminent, a ravivé sur le sol même de la République française les intégrismes catholique et protestant et l’orthopraxie judaïque ; il ne peut y avoir qu’une issue, et nous sommes nombreux à avoir mis en garde au cours des 15, 20, 30 dernières années : la guerre de religion et la guerre civile. La Suède, longtemps montrée comme un « modèle de réussite » du communautarisme, fait les frais aujourd’hui de sa naïveté, de la lâcheté et de l’islamo-collaborationnisme de ses dirigeants ; ce ne sont pas des « émeutes » qui s’y déroulent, comme le répètent à l’envi des médias-autruches pour ne pas prononcer les mots qui brûlent la bouche, c’est une guerre civile. La Première Ministre, une femme de gauche, en avouant l’échec de la politique « d’intégration » – concept fumeux – et d’immigration non-régulée, en soulignant que deux sociétés se faisaient face, révèlent un mirage, une chimère. 
 
            Nous en arrivons enfin à Macron le communautariste. Celui-ci est lié au précédent, et en cela, il n’y a aucune différence entre la droite libérale, l’extrême-centre et la soi-disant gauche NUPES. La Res Publica est littéralement « la Chose publique », donc ce qui est commun, l’intérêt général – et cela dépasse le droit, n’en déplaise aux neo féodaux. De fait, elle s’impose à tous et partout sur son sol. Elle ne peut souffrir aucun intérêt de clan ni aucun particularisme. Elle est donc par essence l’opposition absolue du et au communautarisme, paravent du tribalisme, c’est-à-dire de la guerre de tous contre tous. La tolérance dévoyée et les sophismes, et de la Macronie et du total gauche, traître à ses principes, ses combats et victoires historiques, à son héritage, n’y changeront rien : on ne peut être « en même temps » républicain et communautariste. La République est morte, car on a laissé attaquer la clé de voûte de son édifice : la laïcité !
 
Il ne faudra pas 15 ans pour que ce pays soit à feu et à sang… Amis républicains, citoyens démocrates et laïques, nous avons perdu. Nous encaissons une très lourde défaite. Les années qui viennent seront terribles et sanglantes. Nous ne devons pas nous compromettre ni dans une faction ni dans une autre. Nous devons tenir fermement sur nos principes, nous devons tenir la ligne ! Après-demain, après l’échec constaté par l’immense majorité de nos compatriotes des choix de la Macronie et de la Mélenchonie, il n’y aura que deux alternatives crédibles possibles – et aucune ne pourra faire l’économie de mesures d’exception et d’une politique régalienne autoritaire – : les partisans d’un régime d’inspiration monarchique et catholique, et nous. Force est de constater que les radicaux dont je suis ayant été « extrémisés », nous ne sommes pas, loin s’en faut, en pole position…

Jean-Baptiste Chikhi-Budjeia

Jean-Baptiste Chikhi-Budjeia a grandi et vécu dans la banlieue Ouest d'Aix en Provence. Il est engagé dans des réseaux d'éducation populaire depuis une vingtaine d'années. Militant laïque, républicain radical, il réalise actuellement une thèse de Doctorat d'Histoire moderne sur la sociabilité politique pendant Révolution française. Il est également professeur de Karaté-Do et éducateur sportif professionnel.


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